Workshop
APURIMAC: au cœur de la périphérie
Deuxième partie – les projets au Pérou
Dans les nombreux villages épars dans les Andes du Pérou vivent des personnes qui, en raison de leur éloignement de l’hôpital le plus proche, ont du mal à recevoir des soins de santé. Toujours au Pérou, ces dernières années, de très nombreuses personnes sont arrivées du Venezuela, fuyant un pays qui souffre d’une crise désormais intenable. L’ONG Apurimac ETS est aux côtés de ces personnes, par le biais de deux différents projets, dont les « périphéries » représentent le centre de leurs activités.
Après avoir connu le projet « Tor bell’Infanzia » de Rome (Vous ne l’avez pas encore lu ? Vous le trouvez ici), j’ai contacté Chiara, jeune pharmacienne qui travaille chez Apurimac ETS au Pérou. C’est précisément d’un endroit de ce pays d’Amérique latine que l’ONG tire son nom : l’Apurimac est une région parmi les plus pauvres du Pérou, située au sud-est du pays. Là, il n’y a pas suffisamment de personnel médical pour assurer des soins de santé à l’ensemble de la population, en particulier pour des villages situés à plus de 8 heures de route de l’hôpital le plus proche. C’est pourquoi est né en 2018 le projet « Santé et Télémédecine », qui organise des campagnes de santé itinérantes dans toute la région. J’ai demandé à Chiara de m’expliquer plus précisément en quoi consistent ces campagnes sanitaires. Je lui laisse la parole : elle répond à mes questions par le moyen de cette courte vidéo :
Comme on peut l’imaginer, en cette période de pandémie, il est devenu impossible de mener les campagnes de santé dont parle Chiara, appelées à rassembler au même endroit un grand nombre de personnes. Mais une réponse efficace pour répondre à cette situation a été : la télémédecine ! Déjà expérimenté, puis mis en œuvre bien après le début de la pandémie, l’outil de télémédecine a permis à Apurimac ETS de continuer à fournir des soins de santé à distance. Pour rendre le tout plus efficace, furent confectionnés des kits de santé contenant du matériel médical, une télé caméra et une tablette. Ceux-ci furent mis à la disposition du personnel de santé, qui a pu se rendre dans des villages éloignés des grands centres urbains et peu couverts par le système de santé publique. Très souvent, dans ces endroits, les gens ne parlent pas l’espagnol, mais le quechua, langue inconnue des médecins présents dans les hôpitaux. Cela cause de grandes difficultés, mais certains travailleurs d’Apurimac ETS connaissent les deux langues et font l’office de médiateurs linguistiques et culturels, afin de faciliter la communication. Ce sont ces attentions qui font la différence et permettent de ne laisser personne en arrière.
Chiara m’a mieux expliqué comment, grâce à l’utilisation des kits, on tire de grands avantages pour les activités de soins de santé : « la fonction de chaque kit est d’arriver chez le patient. Grâce à ce système, nous parvenons à effectuer un suivi complet des signes vitaux de très nombreuses personnes ; les données sont reçues et analysées à distance. Le personnel peut ensuite demander des conseils supplémentaires de médecins ou de spécialistes auprès de l’établissement de santé concerné. La télémédecine nous aide ainsi d’arriver, encore aujourd’hui, là où nous apportions auparavant une assistance, au cours de nos campagnes de santé. »
Un autre aperçu d’une société dont Apurimac ETS s’occupe se rencontre chez les migrants vénézuéliens : il s’agit du projet « Paix et santé », opérant dans la ville de Cuzco. Il s’agit d’offrir des soins de santé et de l’assistance juridique à des centaines de migrants vénézuéliens, qui se sont retrouvés au Pérou ces derniers temps. « C’est un véritable exode » – dit Chiara, en expliquant la situation actuelle – « environ 1 million 200 000 migrants sont arrivés au Pérou ». La situation du Venezuela est très critique : l’ONU a jugé cette crise des réfugiés parmi les plus graves au monde. Selon une étude récente du The Economist, 79 % de la population est dans l’extrême pauvreté et 30 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique ou d’arrêt de croissance. De 2015 à aujourd’hui, un sixième des Vénézuéliens ont fui le pays. Le projet « Paix et santé » vise à aider ceux qui arrivent au Pérou dans des conditions désespérées, souvent après des mois de marche. Grâce aux aides financières du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, le projet compte à ce jour plus de 800 bénéficiaires. Quant aux questions légales, furent montés des offices d’information, où les migrants peuvent se rendre pour obtenir de l’aide, afin de régulariser leurs documents et s’inscrire à l’assurance-maladie nationale. D’un point de vue médical, des soins de santé, de base ainsi que spécialisés, sont offerts gratuitement au centre de santé « Policlinico Santa Rita ». Chiara me raconte quelques histoires liées aux personnes aidées par le projet : l’une, en particulier, concerne une grand-mère qui, avec sa nièce, a entrepris la fuite du Venezuela pour rejoindre la mère de la petite fille, déjà arrivée avant elles au Pérou. Pendant le voyage, cependant, les difficultés, en particulier pour les femmes, sont nombreuses : les deux ont été enlevées par un groupe de preneurs d’otages qui, après les avoir séparées, ont exigé de la mère, au Pérou, le paiement d’une rançon pour la libération de sa fille. Ce n’est qu’à la suite du paiement que la petite fut libérée : grand-mère et nièce sont ainsi arrivées à Cuzco. Ils y ont bénéficié d’une aide grâce au projet « Paix et santé » : il était essentiel pour elles de pouvoir obtenir, entre autres, une assistance psychologique pour surmonter ce qui, pour les deux, fut un traumatisme majeur.
Il y a beaucoup d’histoires liées à ce qu’Apurimac ETS fait pour améliorer ces lieux de périphérie, physique et sociale. Pour conclure, j’ai demandé à Chiara si elle avait un message pour tous les jeunes qui connaîtraient ces projets grâce à ses récits. Sa réponse fut brève et efficace : « S’informer et… se mettre au travail !». Elle ajouta : « On voit souvent la réalité tout en négatif, mais ce n’est pas toujours le cas. Il y a beaucoup de gens qui travaillent tellement, si dur, faisant leur part pour rendre ce monde meilleur. Renseignez-vous sur ce que vous pouvez faire, et mettez-vous, vous aussi, au travail ! Peut-être en commençant par le volontariat… ».
Quelques informations pratiques : Apurimac ETS lance chaque année un appel d’offres pour 4 postes de service civil au Pérou. Plus de détails sur leur page web.